LES FLAMANDES
(2:38) (Jacques Brel) - © 1959


Les Flamandes dansent sans rien dire
Sans rien dire aux dimanches sonnants
Les Flamandes dansent sans rien dire
Les Flamandes ça n'est pas causant
Si elles dansent c'est parce qu'elles ont vingt ans
Et qu'à vingt ans il faut se fiancer
Se fiancer pour pouvoir se marier
Et se marier pour avoir des enfants
C'est ce que leur ont dit leurs parents
Le bedeau et même son Eminence
L'archiprêtre qui prêche au couvent
Et c'est pour ça et c'est pour ça qu'elles dansent 

Les Flamandes
Les Flamandes
Les Fla
Les Fla
Les Flamandes 

Les Flamandes dansent sans frémir
Sans frémir aux dimanches sonnants
Les Flamandes dansent sans frémir
Les Flamandes ça n'est pas frémissant
Si elles dansent c'est parce qu'elles ont trente ans
Et qu'à trente ans il est bon de montrer
Que tout va bien que poussent les enfants
Et le houblon et le blé dans le pré
Elles fonts la fierté de leurs parents
Et du bedeau et de Son Eminence
L'archiprêtre qui prêche au couvent
Et c'est pour ça et c'est pour ça qu'elles dansent 

Les Flamandes
Les Flamandes
Les Fla
Les Fla
Les Flamandes 

Les Flamandes dansent sans sourire
Sans sourire aux dimanches sonnants
Les Flamandes dansent sans sourire
Les Flamandes ça n'est pas souriant
Si elles dansent c'est qu'elles ont septante ans
Qu'à septante ans il est bon de montrer
Que tout va bien que poussent les petits-enfants
Et le houblon et le blé dans le pré
Toutes vêtues de noir comme leurs parents
Comme le bedeau et comme son Eminence
L'archiprêtre qui radote au couvent
Elles héritent et c'est pour ça qu'elles dansent 

Les Flamandes
Les Flamandes
Les Fla
Les Fla
Les Flamandes 

Les Flamandes dansent sans mollir
Sans mollir aux dimanches sonnants
Les Flamandes dansent sans mollir
Les Flamandes ça n'est pas molissant
Si elles dansent c'est parce qu'elles ont cent ans
Et qu'à' cent ans il est bon de montrer
Que tout va bien qu'on a toujours bon pied
Et bon houblon et bon blé dans le pré
Elles s'en vont retrouver leurs parents
Et le bedeau et même Son Eminence
L'archiprêtre qui radote au couvent
Et c'est pour ça qu'une dernière fois elles dansent 

Les Flamandes
Les Flamandes
Les Fla
Les Fla
Les Flamandes

L'IVROGNE
(4:04) (Jacques Brel / Gérard Jouannest - François Rauber) - © 1961


Ami, remplis mon verre
Encore un et je vas
Encore un et je vais
Non je ne pleure pas
Je chante et je suis gai
Mais j'ai mal d'être moi
Ami, remplis mon verre
Ami, remplis mon verre
 
Buvons à ta santé
Toi qui sais si bien dire
Oue tout peut s'arranger
Qu'elle va revenir
Tant pis si tu es menteur
Tavernier sans tendresse
Je serai saoul dans une heure
Je serai sans tristesse
Buvons à la santé
Des amis et des rires
Que je vais retrouver
Qui vont me revenir
Tant pis si ces seigneurs
Me laissent à terre
Je serai saoul dans une heure
Je serai sans colère
 
Buvons à ma santé
Que l'on boive avec moi
Que l'on vienne danser
Qu'on partage ma joie
 
Tant pis si les danseurs
Me laissent sous la lune
Je serai saoul dans une heure
Je serai sans rancune
Buvons aux jeunes filles
Qu'il me reste à aimer
Buvons déjà aux filles
Que je vais faire pleurer
Et tant pis pour les fleurs
Qu'elles me refuseront
Je serai saoul dans une heure
Je serai sans passion
 
Buvons à la putain
Oui m'a tordu le cœur
Buvons à plein chagrin
Buvons à pleines pleurs
Et tant pis pour les pleurs
Qui me pleuvent ce soir
Je serai saoul dans une heure
Je serai sans mémoire
Buvons nuit après nuit
Puisque je serai trop laid
Pour la moindre Sylvie
Pour le moindre regret
Buvons puisqu'il est l'heure
Buvons rien que pour boire
Je serai bien dans une heure
Je serai sans espoir
 
Ami, remplis mon verre
Encore un et je vas
Encore un et je vais
Non je ne pleure pas
Je chante et je suis gai
Tout s'arrange déjà
Ami remplis mon verre.

MARIEKE
(2:41) (Jacques Brel / Jacques Brel - Gérard Jouannest) - © 1961


Ay Marieke, Marieke
Je t'aimais tant
Entre les tours
De Bruges et Gand
Ay Marieke, Marieke
Il y a longtemps
Entre les tours
De Bruges et Gand
 
Zonder liefde, waarmde liefde
Wait de wind, de stomme wind
Zonder liefde waarmde liefde
Weent de zee, de grijze zee
Zonder liefde, waarmde liefde
Lijdt het licht, het donker licht
En schuurt de zand over mijn land
Mijn platte land, mijn Vlaanderenland
 
Ay Marieke, Marieke
Le ciel flamand
Couleur des tours
De Bruges et Gand
Ay Marieke, Marieke
Le ciel flamand
Pleure avec moi
De Bruges à Gand
 
Zonder, liefde, warme liefde
Waait de wind, á'est fini
Zonder liefde, waarmde liefde
Weent de zee, déjà fini
Zonder liefde, waarmde liefde
Lijdt het licht, tout est fini
En schuurt het zand over mijn land
Mijn platte land, mijn Vlaanderenland
 
Ay Marieke, Marieke
Le ciel flamand
Pesait-il trop
De Bruges à Gand
Ay Marieke, Marieke
Sur tes vingt ans
Que j'aimais tant
De Bruges à Gand
 
Zonder liefde, waarmde liefde
Lacht de duivel, de zwarte duivel
Zonder liefde, waarmde liefde
Brandt mijn hart, mijn oude hart
Zonder liefde, waarmde liefde
Sterft de zomer, de droeve zomer
En schuurt het zand over mijn land
Mijn platte land, mijn Vlaanderenland
 
Ay Marieke, Marieke
Revienne le temps
Revienne le temps
De Bruges et Gand
Ay Marieke, Marieke
Revienne le temps
Où tu m'aimais
De Bruges à Gand
 
Ay Marieke, Marieke
Le soir souvent
Entre les tours
De Bruges et Gand
Ay Marieke, Marieke
Tous les étangs
M'ouvrent leurs bras
De Bruges à Gand, de Bruges à Gand, de Bruges à Gand...

LE MORIBOND
(3:07) (Jacques Brel) - © 1961


Adieu l'Emile je t'aimais bien
Adieu l'Emile je t'aimais bien tu sais
On a chanté les mêmes vins
On a chanté les même filles
On a chanté les même chagrins
Adieu l'Emile je vais mourir
C'est dur de mourir au printemps tu sais
Mais je pars aux fleurs la paix dans l'âme
Car vu que tu es bon comme du pain blanc
Je sais que prendras soin de ma femme
Je veux qu'on rie
Je veux qu'on danse
Je veux qu'on s'amuse comme des fous
Je veux qu'on rie
Je veux qu'on danse
Quand c'est qu'on me mettra dans le trou
 
Adieu curé je t'aimais bien
Adieu curé je t'aimais bien tu sais
On n'était pas du même bord
On n'était pas du même chemin
Mais on cherchait le même port
Adieu curé je vais mourir
C'est dur de mourir au printemps tu sais
Mais je pars aux fleurs la paix dans l'âme
Car vu que tu étais son confident
Je sais que prendras soin de ma femme
Je veux qu'on rie
Je veux qu'on danse
Je veux qu'on s'amuse comme des fous
Je veux qu'on rie
Je veux qu'on danse
Quand c'est qu'on me mettra dans le trou
 
Adieu l'Antoine je t'aimais bien
Adieu l'Antoine je t'aimais bien tu sais
J'en crève de crever aujourd'hui
Alors que toi tu es bien vivant
Et même plus solide que l'ennui
Adieu l'Antoine je vais mourir
C'est dur de mourir au printemps tu sais
Mais je pars aux fleurs la paix dans l'âme
Car vu que tu étais son confident
Je sais que prendras soin de ma femme
Je veux qu'on rie
Je veux qu'on danse
Je veux qu'on s'amuse comme des fous
Je veux qu'on rie
Je veux qu'on danse
Quand c'est qu'on me mettra dans le trou
 
Adieu ma femme je t'aimais bien
Adieu ma femme je t'aimais bien tu sais
Mais je prends le train pour le Bon Dieu
Je prends le train qui est avant le tien
Mais on prend tous le train qu'on peut
Adieu ma femme je vais mourir
C'est dur de mourir au printemps tu sais
Mais je pars aux fleurs la paix dans l'âme
Car vu que tu étais son confident
Je sais que prendras soin de ma femme
Je veux qu'on rie
Je veux qu'on danse
Je veux qu'on s'amuse comme des fous
Je veux qu'on rie
Je veux qu'on danse
Quand c'est qu'on me mettra dans le trou


Version anglaise :

Goodbye to you, my trusted friend.
We've known each other since we were nine or ten.
Together we've climbed hills and trees,
learned of love and ABC's,
skinned our hearts and skinned our knees.
Goodbye, my friend, it's hard to die
when all the birds are singing in the sky,
now that the spring is in the air,
pretty girls are everywhere.
Think if me and I'll be there.

We had joy, we had fun, we had seasons in the sun
but the hills that we climbed were just seasons out of time.

Goodbye, papa, please pray for me.
I was the black sheep of the family.
You tried to teach me right from wrong.
Too much wine and too much song,
wonder how I got along.
Goodbye, papa, it's hard to die
when all the birds are singing in the sky,
now that the spring is in the air,
little children everywhere,
when you'll see them I'll be there.

We had joy, we had fun, we had seasons in the sun
but the wine and the songs like the seasons have all gone.

Goodbye, Michelle, my little one,
you gave me love and helped me find the sun
and every time that I was down
you would always come around
and get my feet back on the ground.
Goodbye, Michelle, it's hard to die
when all the birds are singing in the sky,
now that the spring is in the air
with the flowers everywhere.
I wish that we could both be there.

All our lives we had fun, we had seasons in the sun
but the stars we could reach were just starfish on the beach.

LE PROCHAIN AMOUR
(3:32) (Jacques Brel / Jacques Brel - Gérard Jouannest) - © 1961


On a beau faire, on a beau dire,
Qu'un homme averti en vaut deux
On a beau faire, on a beau dire,
Ça fait du bien d'être amoureux
 
Je sais, je sais que ce prochain amour
Sera pour moi la prochaine défaite
Je sais déjà à l'entrée de la fête
La feuille morte que sera le petit jour
Je sais, je sais, sans savoir ton prénom
Que je serai ta prochaine capture
Je sais déjà que c'est par leur murmure
Que les étangs mettent les fleuves en prison
 
Je sais, je sais que ce prochain amour
Ne vivra pas jusqu'au prochain été
Je sais déjà que le temps des baisers
Pour deux chemins ne durent qu'un carrefour
Je sais, je sais que ce prochain bonheur
Sera pour moi la prochaine des guerres
Je sais déjà cette affreuse prière
Qu'il faut pleurer quand l'autre est le vainqueur
 
Je sais, je sais que ce prochain amour
Sera pour nous de vivre un nouveau règne
Dont nous croirons tous deux porter les chaînes
Dont nous croirons que l'autre a le velours
Je sais, je sais que ma tendre faiblesse
Fera de nous des navires ennemis
Mais mon cœur sait des navires ennemis
Partant ensemble pour pêcher la tendresse
 
Car on a beau faire, car on a beau dire
Qu'un homme averti en vaut deux
Car on a beau faire, on a beau dire
Ça fait du bien d'être amoureux.

VIVRE DEBOUT
(3:00) (Jacques Brel / François Rauber) - © 1961


Voilà que l'on se cache
Quand se lève le vent
De peur qu'il ne nous pousse
Vers des combats trop rudes
Voilà que l'on se cache,
Dans chaque amour naissant
Qui nous dit après J'autre
Je suis la certitude
Voilà que l'on se cache
Que notre ombre un instant
Pour mieux fuir l'inquiétude
Soit l'ombre d'un enfant
L'ombre des habitudes
Qu'on a planté en nous
Quand nous avions vingt ans
 
Serait-il impossible de vivre debout ?
 
Voilà qu'on s'agenouille
D'ètre à moitié tombé
Sous l'incroyable poids
De nos croix illusoires
Voilà qu'on s'agenouille
Et déjà retombé
Pour avoir été grand
L'espace d'un miroir
Voilà qu'on s'agenouille
Alors que notre espoir
Se réduit à prier
Alors qu'il est trop tard
Qu'on ne peut plus gagner
 
A tous ces rendez-vous
Que nous avons manqués
 
Serait-il impossible de vivre debout ?
 
Voilà que l'on se couche
Pour la moindre amourette
Pour la moindre fleurette
A qui l'on dit toujours
Voilà que l'on se couche
Pour mieux perdre la tête
Pour mieux brûler l'ennui
A des reflets d'amour
Voilà que l'on se couche
De l'envie qui s'arrête
De prolonger le jour
Pour mieux faire notre cour
A la mort qui s'apprête
Pour être jusqu'au bout
Notre propre défaite.
 
Serait-il impossible de vivre debout ?

LES PRÉNOMS DE PARIS
(2:37) (Jacques Brel / Gérard Jouannest) - © 1961


Le soleil qui se lève
Et caresse les toits
Et c'est Paris le jour
La Seine qui se promène
Et me guide du doigt
Et c'est Paris toujours
Et mon cœur qui s'arrête
Sur ton cœur qui sourit
Et c'est Paris bonjour
Et ta main dans ma main
Qui me dit déjà oui
Et c'est Paris l'amour
Le premier rendez-vous
A l'lle Saint-Louis
C'est Paris qui commence
Et le premier baiser
Volé aux Tuileries
Et c'est Paris la chance
Et le premier baiser
Reçu sous un portail
Et c'est Paris romance
Et deux têtes quitournent
En regardant Versailles
Et c'est Paris la France
 
Des jours que l'on oublie
Qui oublient de nous voir
Et c'est Paris l'espoir
Des heures où nos regards
Ne sont qu'un seul regard
Et c'est Paris miroir
Rien que des nuits encore
Qui séparent nos chansons
Et c'est Paris bonsoir
Et ce jour-là enfin
Où tu ne dis plus non
Et c'est Paris ce soir
Une chambre un peu triste
Où s'arrête la ronde
Et c'est Paris nous deux
Un regard qui reçoit
La tendresse du monde
Et c'est Paris tes yeux
Ce serment que je pleure
Plutôt que ne le dis
C'est Paris si tu veux
Et savoir que demain
Sera comme aujourd'hui
C'est Paris merveilleux
 
 
Mais la fin du voyage
La fin de la chanson
Et c'est Paris tout gris
Dernier jour dernière heure
Première larme aussi
Et c'est Paris la pluie
Ces jardins remontés
Qui n'ont plus leur parure
Et c'est Paris l'ennui
La gare où s'accomplit
La dernière déchirure
Et c'est Paris fini
Loin des yeux loin du cœur
Chassé du Paradis
Et c'est Paris chagrin
Mais une lettre de toi
Une lettre qui dit oui
Et c'est Paris demain
Des villes et des villages
Les roues tremblent de chance
C'est Paris en chemin
Et toi qui m'attends là
Et tout qui recommence
Et c'est Paris je reviens.

CLARA
(2:56) (Jacques Brel) - © 1961


refrain :
 
Je t'aimais tant Clara
Je t'aimais tant
Je t'aimais tant Clara
Je t'aimais tant
 
Carnaval à Rio
Tu peux toujours danser
Carnaval à Rio
Tu n'y peux rien changer
Je suis mort à Paris
Il y a longtemps déjà
Il y a longtemps d'ennui
Il y a longtemps de toi
 
refra i n
 
Carnaval à Rio
Tu peux toujours chanter Carnavalà Rio
Tu n'y peux rien changer Je suis mort à Paris
Tombé au champ d'amour Pour un prénom de fille
Qui m'avait dit toujours
 
refrain
 
Carnavalà Rio
Tu peux toujours tourner
Carnavalà Rio
Tu n'y peux rien changer
Je suis mort à Paris
De m'être trop trompé
De m'être trop meurtri
De m'être trop donné
 
refrain
 
Carnaval à Rio
Tu peux me bousculer
Carnaval à Rio
Tu n'y peux rien changer
Je suis mort à Paris
Fusillé par une fleur
Au poteau de son lit
De douze rires dans le cœur
 
refrain
 
Carnaval à Rio
Tu peux toujours crier Carnaval à Rio
Tu n'y peux rien changer Je suis mort à Paris
Il y a mille soirs
Il y a mille nuits
Il n'y a plus d'espoir
 
refrain
 
Carnaval à Rio
Tu peux bien me saouler
Carnaval à Rio
Tu n'y peux rien changer
Je suis mort à Paris
A Paris que j'enterre
Et depuis mille nuits
Dans le fond de mon verre
 
refrain
Carnaval à Rio
Tu peux carnavaler
Carnaval à Rio
 
Tu n'y peux rien changer
Je suis mort à Paris
Que la mort me console
La mort est par ici
La mort est espagnole.
 
refrain

ON N'OUBLIE RIEN
(3:06) (Jacques Brel / Gérard Jouannest) - © 1961


On n'oublie rien, de rien
On n'oublie rien du tout
On n'oublie rien de rien
On s'habitue, c'est tout.
 
Ni ces départs, ni ces navires
Ni ces voyages qui nous chavirent
De paysages en paysages
Et de visages en visages
Ni tous ces ports, ni tous ces bars
Ni tous ces attrape-cafard
Où l'on attend le matin gris
Au cinéma de son whisky
Ni tout cela, ni rien au monde
Ne sait pas nous faire oublier
Ne peut pas nous faire oublier
Qu'aussi vrai que la terre est ronde.
 
Ni ces jamais, ni ces toujours
Ni ces je t'aime, ni ces amours
Que l'on poursuit à travers cœurs
De gris en gris, de pleurs en pleurs
Ni ces bras blancs d'une seule nuit
Collier de femme pour notre ennui
Que l'on dénoue au petit jour
Par des promesses de retour
Ni tout cela, ni rien au monde
Ne sait pas nous faire oublier
Ne peut pas nous faire oublier
Qu'aussi vrai que la terre est ronde.
 
Ni même ce temps où j'aurais fait
Mille chansons de mes regrets
Ni même ce temps où mes souvenirs
Prendront mes rides pour un sourire
Ni ce grand lit où mes remords
Ont rendez-vous avec la mort
Ni ce grand lit que je souhaite
A certains jours comme une fête
Ni tout cela ni rien au monde
Ne sait pas nous faire oublier
Ne peut pas nous faire oublier
Qu'aussi vrai que la terre est ronde.

LES SINGES
(3:04) (Jacques Brel) - © 1961


Avant eux avant les culs pelés
La fleur l'oiseau et nous étions en liberté
Mais ils sont arrivés et la fleur est en pot
Et l'oiseau est en cage et nous en numéro
Car ils ont inventé prisons et condamnés
Et casiers judiciaires et trous dans la serrure
Et les langues coupées des premières censures
Et c'est depuis lors qu'ils sont civilisés
Les singes, les singes, les singes de mon quartier (bis)
 
Avant eux, il n'y avait pas de problème
Quand poussaient les bananes même pendant le Carême
Mais ils sont arrivés bardés d'intolérance
Pour chasser en apôtres d'autres intolérances
Car ils ont inventé la chasse aux Albigeois
La chasse aux infidèles et la chasse à ceux-là
La chasse aux singes sages qui n'aiment pas chasser
Et c'est depuis lors qu'ils sont civilisés
Les singes, les singes, les singes de mon quartier
 
Avant eux l'homme était un prince
La femme une princesse, l'amour une province
Mais ils sont arrivés, le prince est un mendiant
La province se meurt, la princesse se vend
Car ils ont inventé l'amour qui est un péché
L'amour qui est une affaire, le marché aux pucelles
Le droit de courte-cuisse et les mères maquerelles
Et c'est depuis lors qu'ils sont civilisés
Les singes, les singes, les singes de mon quartier
 
Avant eux il y avait paix sur terre
Quand pour dix éléphants il n'y avait qu'un militaire
Mais ils sont arrivés et c'est à coups de bâton
Que la raison d'Etat a chassé la raison
Car ils ont inventé le fer à empaler
Et la chambre à gaz et la chaise électrique
Et la bombe au napalm et la bombe atomique
Et c'est depuis lors qu'ils sont civilisés
Les singes, les singes, les singes de mon quartier
Les singes de mon quartier.

VOIR
(2:21) (Jacques Brel) - © 1958


Voir la rivière gelée
Vouloir être un printemps
Voir la terre brûlée
Et semer en chantant
Voir que l'on a vingt ans
Vouloir les consumer
Voir passer un croquant
Et tenter de l'aimer
 
Voir une barricade
Et la vouloir défendre
Voir périr l'embuscade
Et puis ne pas se rendre
Voir le gris des faubourgs
Vouloir être Renoir
Voir l'ennemi de toujours
Et fermer sa mémoire
 
Voir que l'on va vieillir
Et vouloir commencer
Voir un amour fleurir
Et s'y vouloir brûler
Voir la peur inutile
La laisser aux crapauds
Voir que l'on est fragile
Et chanter à nouveau
 
Voilà ce que je vois
Voilà ce que je veux
Depuis que je te vois
Depuis que je te veux.

L'AVENTURE
(2:38) (Jacques Brel) - © 1958


L'aventure commence à l'aurore
A l'aurore de chaque matin
L'aventure commence alors
Que la lumière nous lave les mains
L'aventure commence à l'aurore
Et l'aurore nous guide en chemin
L'aventure c'est le trésor
Que l'on découvre à chaque matin
Pour Martin c'est le fer sur l'enclume
Pour César le vin qui chantera
Pour Yvon c'est la mer qu'il écume
C'est le jour qui s'allume
C'est le blé que l'on bat
L'aventure commence à l'aurore
A l'aurore de chaque matin
L'aventure commence alors
Que la lumière nous lave les mains
 
Tout ce que l'on cherche à redécouvrir
Fleurit chaque jour au coin de nos vies
La grande aventure il faut la cueillir
Entre notre église et notre mairie
Entre la barrière du grand-père Machin
Et le bois joli de monsieur le baron
Et entre la vigne de notre voisin
Et le doux sourire de la Madelon
La Madelon
 
Tous ceux que l'on cherche à pouvoir aimer
Sont auprès de nous et à chaque instant
Dans le creux des rues dans l'ombre des prés
Au bout du chemin au milieu des champs
Debout dans le vent et semant le blé
Pliés vers le sol saluant la terre
Assis près des vieux et tressant l'osier
Couchés au soleil buvant la lumière
Dans la lumière.

LES MOUTONS
(2:20) (Jacques Brel / Jacques Brel - Gérard Jouannest) - © 1988


Désolé bergère,
J'aime pas les moutons
Qu'ils soient pure laine
Ou en chapeau melon,
Qu'ils broutent leur colline,
Qu'ils broutent le béton,
Menés par quelques chiens
Et par quelques bâtons
Désolé bergère,
J'aime pas les moutons
 
Désolé bergère,
J'aime pas les agneaux
Qui arrondissent le dos
De troupeau en troupeau,
De troupeau en étable
Et d'étable en bureau
J'aime encore mieux les loups,
J'aime mieux les moineaux
Désolé bergère,
J'aime pas les agneaux
 
Désolé bergère,
J'aime pas les brebis
Ça arrive toutes tordues
Et ça dit déjà &laqno; oui »
Ça se retrouve tondues
Et ça re, redit &laqno; oui »
Ça se balance en boucherie
Et ça re, redit &laqno; oui ».
Désolé bergère,
J'aime pas les brebis
 
Désolé bergère,
J'aime pas les troupeaux
Qui ne voient pas plus loin
Que le bout de leur coteau
Qui avancent en reculant
Qui se noient dans un verre d'eau bénite
Et dès que le vent se lève,
Montrent le bas de leur dos
Désolé bergère,
J'aime pas les troupeaux
 
Désolé bergère,
J'aime pas les bergers
Désolé bergère,
J'aime pas les bergers
Il pleut, il pleut bergère,
Prends garde à te garder,
Prends garde à te garder, bergère,
Un jour tu vas bêler
Désolé, bergère,
J'aime pas les bergers
 
Désolé bergère,
J'aime pas les moutons
Qu'ils soient pure laine
Ou en chapeau melon,
Qu'ils broutent leur colline,
Qu'ils broutent le béton,
Menés par quelques chiens
Et par quelques bâtons,
Désolé bergère,
J'aime pas les moutons
Bêêèêêh...

LES AMANTS DE CŒUR (THE LOVERS)
(4:46) (Rod McKuen / paroles françaises Jacques Brel) - © 1982


Ils s'aiment s'aiment en riant
Ils s'aiment s'aiment pour toujours
Ils s'aiment tout au long du jour
Ils s'aiment s'aiment s'aiment tant
Qu'on dirait des anges d'amour
Des anges fous se protégeant
Quand se retrouvent en courant
Les amants
Les amants de cœur
Les amants
 
Ils s'aiment s'aiment à la folie
S'effeuillant à l'ombre des feux
Se découvrant comme deux fruits
Puis se trouvant n'être plus deux
Se dénouant comme velours
Se reprenant au petit jour
Et s'endormant les plus heureux
Les amants
Les amants de cœur
Les amants
 
Ils s'aiment s'aiment en tremblant
Le cœur mouillé le cœur battant
Chaque seconde est une peur
Qui croque le cœur entre ses dents
Ils savent trop de rendez-vous
Où ne vinrent que des facteurs
Pour n'avoir pas peur du loup
Les amants
Les amants de cœur
Les amants
 
Ils s'aiment s'aiment en pleurant
Chaque jour un peu moins amants
Quand ils ont bu tout leur mystère
Deviennent comme soeur et frère
Brûlent leurs ailes d'inquiétude
Redeviennent deux habitudes
Alors changent de partenaire
Les amants
Les amants de cœur
Les amants
 
Qui s'aiment s'aiment en riant
Qui s'aiment s'aiment pour toujours
Qui s'aiment tout au long du jour
Qui s'aiment s'aiment s'aiment tant
Qu'on dirait des anges d'amour
Des anges fous se protégeant
Quand ils se retrouvent en courant
Les amants
Les amants de cœur
Les amants.

IL NEIGE SUR LIÈGE
(2:56) (Jacques Brel) - © 1979


Il neige il neige sur Liège
Et la neige sur Liège pour neiger met des gants
Il neige il neige sur Liège
Croissant noir de la Meuse sur le front d'un clown blanc
Il est brisé le cri
Des heures et des oiseaux
Des enfants à cerceaux
Et du noir et du gris
Il neige il neige sur Liège
Que le fleuve traverse sans bruit
 
Il neige, il neige sur Liège
Et tant tourne la neige entre le ciel et Liège
Qu'on ne sait plus s'il neige s'il neige sur Liège
Où si c'est Liège qui neige vers le ciel
Et la neige marie
Les amants débutants
Les amants promenant
Sur le carré blanchi
Il neige il neige sur Liège
Que le fleuve transporte sans bruit
 
Ce soir ce soir il neige sur mes rêves et sur Liège
Que le fleuve transperce sans bruit.

POURQUOI FAUT-IL QUE LES HOMMES S'ENNUIENT ?
(3:33) (Jacques Brel) - © 1988


Pourtant les hôtesses sont douces
Aux auberges bordées de neige
Pourtant patientent les épouses
Que les enfants ont prises au piège
Pourtant les auberges sont douces
Où le vin fait tourner manège
Pourquoi faut-il que les hommes s'ennuient
 
Pourtant les villes sont paisibles
Où tremblent cloches et clochers
Mais le diable dort-il sous la bible
Mais les rois savent-ils prier
Pourtant les villes sont paisibles
De blanc matin et blanc coucher
Pourquoi faut-il que les hommes s'ennuient
 
Pourtant il nous reste à rêver
Pourtant il nous reste à savoir
Et tous ces loups qu'il faut tuer
Tous ces printemps qu'il reste à boire
Désespérance ou désespoir
Il nous reste à être étonné
Pourquoi faut-il que les hommes s'ennuient
 
Pourtant il nous reste à tricher
Etre le pique et jouer cœur
Etre la peur et rejouer
Etre le diable et jouer fleur
Pourtant il reste à patienter
Bon an mal an on ne vit qu'une heure
Pourquoi faut-il que les hommes s'ennuient.

LES CŒURS TENDRES
(3:31) (Jacques Brel) - © 1967


Y en a qui ont le cœur si large
Qu'on y entre sans frapper
Y en a qui ont le cœur si large
Qu'on n'en voit que la moitié
Y en a qui ont le cœur si frêle
Qu'on le briserait du doigt
Y en a qui ont le cœur trop frêle
Pour vivre comme toi et moi
Z'ont plein de fleurs dans les yeux
Les yeux à fleur de peur
De peur de manquer l'heure
Qui conduit à Paris
 
Y en a qui ont le cœur si tendre
Qu'y reposent les mésanges
Y en a qui ont le cœur trop tendre
Moitié homme et moitié ange
Y en a qui ont le cœur si vaste
Qu'ils sont toujours en voyage
Y en a qui ont le cœur trop vaste
Qu'ils sont toujours en voyage
Y en a qui ont le cœur trop vaste
Pour se priver de mirages
Z'ont plein de fleurs dans les yeux
Les yeux à fleur de peur
De peur de manquer l'heure
Qui conduit à Paris
 
Y en a qui ont le cœur dehors
Et ne peuvent que l'offrir
Le cœur tellement dehors
Qu'ils sont tous à s'en servir
Celui-là a le cœur dehors
Et si frêle et si tendre
Que maudits soient les arbres morts
Qui ne pourraient point l'entendre
A plein de fleurs dans les yeux
Les yeux à fleur de peur
De peur de manquer l'heure
Qui conduit à Paris.

L'ENFANCE
(2:53) (Jacques Brel) - © 1973


L'enfance,
Qui peut nous dire quand ça finit,
Qui peut nous dire quand ça commence,
C'est rien, avec de l'imprudence,
C'est tout ce qui n'est pas écrit,
 
L'enfance,
Qui nous empêche de la vivre
De la revivre infiniment,
De vivre à remonter le temps,
De déchirer la fin du livre
 
L'enfance,
Qui se dépose sur nos rides
Pour faire de nous de vieux enfants,
Nous revoilà jeunes amants,
Le cœur est plein, la tête est vide,
L'enfance, l'enfance,
 
L'enfance,
C'est encore le droit de rêver,
Et le droit de rêver encore,
Mon père était un chercheur d'or,
L'ennui, c'est qu'il en a trouvé,
 
L'enfance,
Il est midi tous les quarts d'heure,
Il est jeudi tous les matins,
Les adultes sont déserteurs,
Tous les bourgeois sont des Indiens,
 
L'enfance,
L'enfance.

LA CHANSON DE VAN HORST
(2:59) (Jacques Brel / Jacques Brel -Gérard Jouannest) - © 1988


De Rotterdam à Santiago
Et d'Amsterdam à Varsovie
De Cracovie à San Diego
De drame en dame
Passe la vie
De peu à peu
De cœur en cœur
De peur en peur
De port en port
Le temps d'une fleur
Et l'on s'endort
Le temps d'un rêve
Et l'on est mort
 
De terre en terre
De place en place
De jeune vieille
En vieille grâce
De guerre en guerre
De guerre lasse
La mort nous veille
La mort nous glace
 
Mais!...
De bière en bière
De foire en foire
De verre en verre
De boire en boire
Je mords encore
A pleines dents
Je suis un mort
Encore vivant.

IL Y A
(2:22) (Jacques Brel / Jacques Brel - Lou Logist) - © 1953


Il y a tant de brouillard dans les ports, au matin
Qu'il n'y a de filles dans le cœur des marins
Il y a tant de nuages qui voyagent là-haut
Qu'il n'y a d'oiseaux
Il y a tant de labours il y a tant de semences
Qu'il n'y a de joie d'espérance
Il y a tant de ruisseaux il y a tant de rivières
Qu'il n'y a de cimetières
 
Mais il y a tant de bleu dans les yeux de ma mie
Il y a dans ses yeux tant de vie
Il y a dans ses cheveux un d'éternité
Sur sa lèvre tant de gaieté
 
Il y a tant de lumière dans les rues des cités
Qu'il n'y a d'enfants désolés
Il ya tant de chanson perdues dans le vent
Qu'il n'y a d'enfants
Il ya tant de vitraux, il y a tant de clochers
Qu'il n'y a de voix qui nous disent d'aimer
Il y a tant de canaux qui traversent la terre
Qu'il n'y a de rides au visage des mères.

LA FOIRE
(3:21) (Jacques Brel / Jacques Brel - Lou Logist) - © 1953


refrain :
 
J'aime la foire où pour trois sous
L'on peut se faire tourner la tête
Sur les manèges aux chevaux roux
Au son d'une musique bête
 
Les lampions jettent au firmament
Alignés en nombres pairs
Comme des sourcils de géant
Leurs crachats de lumière
Les moulins tournent, tournent sans trêve
Emportant tout notre argent
Et nous donnant un peu de rêve
Pour que les hommes soient contents
 
Ça sent la graisse où dansent les frites
Ça sent les frites dans les papiers
Ça sent les beignets qu'on mange vite
Ça sent les hommes qui les ont mangés
Partout je vois à petits pas
Des couples qui s'en vont danser
Mais moi sûrement je n'irai pas
Grand-mère m'a dit de me méfier
 
Et lorsque l'on n'a plus de sous
Pour se faire tourner la tête
Sur les manèges aux chevaux roux
Au son d'une musique bête
On rentre chez soi lentement
Et tout en regardant les cieux
On se demande simplement
S'il n'existe rien de mieux.