C'EST EN VAIN
(2:33) (Mano Solo / Eric Bijon) - © 1995
Et je sais que c'est en vain
que je mords un sein
que j'embrasse une épaule
que ma peau se frotte et frôle
et je sais que c'est en vain
que mille fois je replonge
sans jamais me mouiller
sans jamais me noyer
et je sais que c'est en vain
que je dévore la route
pour chaque soir étaler mes croûtes
mais tu n'es pas dans la salle
c'est sur une autre scène que tu déballes
tes oripeaux
et ton pipo
et je sais que c'est en vain
y'a plus que des villes sans fleuve
des pays sans femme et sans chien
y'a plus que des ports sans voile
et des métros sans bouche
j'ai oublié ton numéro
mais pas celui qu'on faisait tous les deux
j'aurais beau chercher une voix sans traverses
un chemin sans l'enfer
j'aurais beau courir plus vite que mon corps
et trouver une mort sans cimetière
j'aurais beau chercher des journées sans remords
et des boules sans qui-est-ce ?
j'aurais beau lutter sans forces
et abandonner avec violence
je sais que c'est en vain
depuis toi je n'aime rien.
TANGO
(1:58) (Mano Solo / Matu) - © 1995
Faut voir comment qu'on tronçonne les rêves
c'est la vraie boucherie
et t'as l'espoir qui coule là puis se répand
sur un carrelage tout blanc
à la morgue du désir
au cimetière d'un fil
et je retrouve le vent d'hier
et je retrouve la pluie d'hiver
pour le prochain coup
je suis pas sûr de tenir debout
je suis pas sûr d'être encore assez vivant
va peut-être falloir que je m'arrête là maintenant
que je remette sur mon dos voûté
ma défroque de givre
et mon cœur en parpaing
ça rime avec ne pars pas
va encore falloir se rogner une patte
et ramper dans un autre monde
dans d'autres mâchoires à broyer les histoires
c'est pas une vie la sécheresse en hiver
toute cette peau sur des hectares
que seul le vent glacé
vient durcir jusqu'à craquer
c'est pas une vie la sécheresse en hiver
même si c'en a tout l'air
c'est pas une vie.
SOIR DE RETOUR
(3:17) (Mano Solo / Matu) - © 1995
Alors Pigalle s'imitait elle-même
dans la fraîcheur d'un soir de retour
en plantant ses griffes molles comme par habitude
et tout glisse
au Noctambules un Picon-bière
le même que dans la France entière
sauf les chansons qui viendront plus tard
faire la quête au comptoir
et pour dix balles te raconter l'histoire
de Paris-Survie le cœur du monde
accroché à son ruisseau
comme un chien à son maître
tu sais j'ai eu trop froid
Je rentre me coucher
et l'orchestre reprend
comme des petits chiens à l'arrière des voitures
avec un ressort sans fin
qui te fixent d'un œil vitreux
ils ne savent plus quelle chanson ils jouent
c'est la ballade d'un marinier
prisonnier d'un voyage sans but
dans tous les ports
vides de femmes à user
sa haine au zinc tu sais
j'ai eu si froid
j'ai eu trop froid
je me réveille sur Tati
t'es déjà loin
mais j'ai chaud tu sais
quand on revient à Paris
on se dit hey Paris
c'est quoi c'est des gens une histoire
ou seulement des murs et des trottoirs
un soir de retour ça pue toujours
un peu la mort
un soir de retour on est toujours
en manque d'amour en manque d'amour.
Y'A MALDONNE
(3:48) (Mano Solo) - © 1995
Y'a maldonne pour les hommes aux quatre coins de la terre
j'entends le glas qui sonne fais tes prières
y'a du sang dans le caniveau y'a de la cervelle sur les murs
à la télé ça fait crado ça fait longtemps que ça dure
Refrain:
Mais toi dans ton paradis tout petit
Tu te prends la tête et tu t'ennuies
Tu sais même pas quel goût ça a la vie
Là-bas
Y'a maldonne pour les hommes emprisonnés
qu'ont plus qu'un os à ronger la fatalité
y'a maldonne pour tous ceux qu'ont rien à bouffer
alors qu'ici on en jette des tonnes moi ça me fait gerber
refrain
Là-bas c'est trois étoiles sur un col
une étoile rouge pour tous
il n'y a plus de bonne étoile
là-bas dans les ghettos
y'en a qui font la peau
à grand coup de pétoire
pour juste un bout de trottoir
là-bas
dans les stades c'est l'arbitre qu'a un gros flingue
et c'est carton rouge pour tout le monde
Refrain
Là-bas dans la brousse y'a surtout des mouches
collées sur les yeux de ceux qui meurent de faim
là-bas dans les rues y'a des obus
qui font leur marché
un enfant par-ci
un combattant par là
un enfant
un combattant
un enfant
un combattant
un sniper à sa fenêtre
un enculé
PARIS BOULEVARDS
(4:22) (Mano Solo) - © 1995
Et paris qui étale ses boulevards
devant mes yeux qui broient toujours la même histoire
d'attendre qu'il se mette à pleuvoir
pour lever la tête et pour pouvoir pleurer
Paris étale ses boulevards
pour tous ses fils bâtards
qui sont nés quelque part
entre le désir la mort et l'ennui
Paris étale ses boulevards
et ses tours de Babel en carton
qui renferment leurs milliers de solitudes glacées
Paris je t'aime
mais souvent je te hais
nous vivons dans ton squelette
et tu meurs un peu plus chaque jour dans nos têtes
Paris mon père Paris ma mère Paris mon frère
Paris tous mes enfants
je suis le fils de notre tristesse
de cette grande famille en famine assoiffée de tendresse
emmurée dans sa migraine
au point d'en oublier son cœur et ses deux mains
Paris je te fuis Paris je reviens
mais des fois je me dis que c'est toi
qu'es vraiment loin
loin de toi-même comme on l'est tous
à plus vouloir savoir le goût que t'as dans la bouche
Paris tu marches avec moi
Paris étale ses boulevards
comme des coulées d'espoir coagulé
Paris le monde entier t'appartient
pourtant tu tiens au creux de ma main
hey Paris
DIS-MOI
(3:08) (Mano Solo / Eric Bijon) - © 1995
Dis-moi je crèverai seul
comme un chien en haut d'une montagne
qui plonge dans la mer en plein vent
la narine frémissante
et tous les sens en éveil
pour le dernier show de la vie
dis-moi qu'un oiseau viendra
me rassurer de son indifférence
tout va bien me dira-t-il
il est juste grand temps de pourrir
dis-moi que les feuilles
viendront roussir
et qu'avec elles le vent m'emportera
sans qu'aucun boulet de la vie
pour une fois ne puisse me retenir
alors il ne sera rien que je regrette
sauf peut-être cette vie entière
que nous n'avons pas vécue
cette promesse non tenue
mais qu'importe que le vent m'emporte
nourrir les vers et les cloportes
ce sera bien là de toute une vie
le seul contrat bien rempli
je n'ai jamais vendu mon âme
mais c'est mille fois que je l'ai offerte
en pure perte en pur drame
en pâture aux femmes
mais de tout ce vin
ne reste que le tanin
vinaigre de plaies par trop ouvertes
au fond d'un grâal puits sans fin
où se dilue l'hier sans lendemain
dis-moi que ça ne fait rien
ce sera juste la preuve
que ce n'était que ça qu'être humain
c'est peut-être ça qui est bien
c'est peut-être ça qui est bien.
TU T'ENVOLES
(4:27) (Mano Solo) - © 1995
J'ai pas la vie qu'est trop facile
je sais même plus si c'est ça une vie
je suis pas près d'être moins triste
surtout quand je te vois
j'ai pas la vie qu'est trop facile
j'ose plus bouger d'un cil
de peur de passer sous le métro
ou me faire écraser par un piano
tu ouvres les ailes et tu t'envoles
je voudrais te suivre
mais je pèse des tonnes
J'habite sur tétanos boulevard
là où l'élan des femmes se suspend
au dernier instant
comme happées elles disparaissent
maudit boulevard du crime où l'on cherche
qui l'assassin qui la victime
on est tous un peu les deux
le point commun c'est qu'on est pas heureux
la vie elle te fait pas de cadeaux
ou alors d'un coup elle t'en fait trois
la mort la mort et la mort
de l'âme du cœur et du corps
et ces trois cadeaux maudits
je les ai fait moi aussi
comprends que ça pèse sur mon sourire
que ça me donne juste l'envie d'en finir
je te connais pas je ne t'ai jamais vue
mais si un soir au coin de la rue
tu t'accroches aux feux dans mes yeux
écoute la peur au fond de ton cœur
c'est le regard d'un naufrageur
qui d'ici jusqu'à la mer
j'ai cramé toute ma garrigue
qui d'ici jusqu'à l'enfer
y'a plus qu'un pas dans le vide
Alors ouvre tes ailes
et envole-toi
ne me laisse pas te suivre
où tu pèseras avec moi.
BARBÈS-CLICHY
(4:01) (Mano Solo) - © 1995
Una lagrima me quema
como la gana
destar contigo nina pero
no puedo no puedo
de Barbes asta Place Clichy
contigo
de Barbes asta Place Clichy
por un ultimo
beso en el rio de fuego la corriente del infierno
Paris dame un beso
y cojeme
en tus brasos cada dia
me levanto con la misma
gana destar
contigo pero no puedo
et l'œil rivé sur le canal
moi je pense à Pigalle
Paris j'ai la fringale de toi
Paris prends-moi dans tes bras
de Barbes jusqu'à Place Clichy
c'est là que j'aime à perdre ma vie
esperame esperame llego pronto Paris
QUAND TU ME DIRAS
(3:12) (Mano Solo) - © 1995
Quand tu me diras
Que tu me vois plus
Que tu m'as trop vu
Que tu peux plus me 'voir
Quand tu me diras
Que tu me sens plus
Que je sens trop fort
Que je pue la mort
Refrain
Quand tu me diras
Tous ces trucs là
Moi j'entendrai rien
J'serai d'jà loin
Dans la musique
Qui m'emporte
Et qui me prend dans ses bras
La musique qui me réchauffe la tripe
Et qui pleure avec moi
Quand tu me diras
Que je te fais peur
Quand tu me diras
Que ta vie, elle est ailleurs
Quand tu me diras
Que l'amour est un jeu d'enfant
Mais que t'as plus 15 ans
Refrain
Quand tu me diras
Quand tu me diras
Tous ces trucs là
Moi j'entendrai rien
Tout ce que tu me dis c'est des conneries
Moi je penserai qu'à te prendre la main
Elle sera toute froide mais ça fait rien
Fait rien, ça fait rien, moi je serai parti
J'serai d'jà loin
UNE IMAGE
(3:51) (Mano Solo) - © 1995
Une robe Gaultier bien serrée
Et son rouge au coin du bec
Elle a claqué l'escalier
Alors la nuit l'a emportée
Refrain
Une image comme une autre
Un mirage des nuits d'ici
Une image dans une autre
Un mirage des nuits d'Paris
Elle glissait dans la musique
En éclairant les regards
Elle tordait son corps
En tournant pour noyer sa tête
Refrain
On aurait dit une image de pub
Une de celles qui font croire au bonheur
Elle riait de toutes ses dents
Les dix doigts plantés dans l'instant
Refrain
Elle rentrait seule au p'tit matin
Poudrer son nez dans son miroir
En r'gardant couler des larmes
Qu'elle oubliera dès ce soir
Une robe Gaultier bien serrée
Et son rouge au coin du bec
Elle va claquer l'escalier
Alors la nuit va l'emporter
À PAS DE GÉANTS
(2:02) (Mano Solo / Matu / Mano Solo) - © 1995
Il s'approche et me lèche
de ses rayons à la sensation nouvelle
ni chaud ni froid
juste plus près de moi
il s'approche
et s'accroche
à mon corps raviné
pour enfin l'avaler
ceux qui en reviennent disent que c'est tout blanc
et que pour une fois c'est apaisant
je regarde à la télé
des documentaires animaliers
savez-vous qu'en Australie des oiseaux font de la peinture
et ces petits trains
de scarabées gros comme le poing
qui sous la lune
ondulent sur les dunes
ce n'est pas tant que j'aime la mienne
ce qui est sûr c'est que j'aime la vie
parce qu'avec un cafard pareil
je me serais bien flingué ici
la vie est un chemin d'argile
qui sous le soleil s'effrite où l'on s'embourbe sous la pluie
et qui ne tient que gelé par l'hiver
j'avance dans le froid
sa morsure me fait courir
Phillipides maudit ma grande nouvelle à bras le corps
je bute tombe et repars
laissant là un bout de ma vie
ma grande nouvelle aura changé
c'est la mort qui est annoncée
mais l'hiver c'est fait pour résister
alors mes jambes le moteur
ma tripe l'ardeur mon cœur
la blessure ma tête
la rage se réveillent
tout d'un coup
et lancent un sprint de fou
rien ne m'arrêtera
je serai premier
avant la mort
et bras d'honneur à l'arrivée.
LES POISSONS
(4:28) (Mano Solo) - © 1995
Les rêves ça pousse sous la pluie quand la dernière larme fait déborder la rigole et le flot t'emporte loin très vite et tu ne sens plus le froid l'eau qui te mouille et tu respires dans la vague en déclarant aux poissons
Plutôt crever plutôt mourir que ne pas vivre
Alors ils t'écoutent sachant bien que tu n'es pas d'ici et comme un étranger rentrant chez lui tu vas partir
Tu n'es pas de ce monde et ta femme jalouse possessive et redoutable a laissé sur toi son parfum tenace et visqueux
Madame la mort ne supporte pas d'incartade tout juste elle te donne du mou à faire le fanfaron déchiré sur un comptoir à hurler pour un panier de crabes une tribu de morues et un banc de maquereaux en brandissant ton poing rageur
Moi c'est pas ma femme qui porte la culotte alors ils rient ou s'émeuvent du ridicule ou de la naïveté et les conversations reprennent chacun dans sa bulle d'eau propre les poissons s'en branlent ils ne viendront pas chez toi vérifier a-t-on déjà vu sortir de l'eau et visiter la réalité ?
Il y a pourtant tant de choses à dire tant de choses à faire tant de barreaux à scier avec les dents qui restent il y a tant de morts à vivre en toi cimetière ambulant de souvenirs de chair et de sang d'espoirs inassouvis abattus en plein vol tant de haine qui ne se tait que pour reprendre son souffle tant d'amour jamais si vrai qu'au moment où il fait mal
Tant de choses à dire tant de chemin parcouru pour n'oublier que les autres qu'on traverse et qu'on transperce pour se retrouver tout rouge la bouche dégoulinante d'une valve qu'on mâche encore il y a tant de vérités qui ne servent qu'à mentir tant de merder pour chaque jour sortir de mon cul il y a tout ce qu'on mange et tout ce qu'on tue il y a tant d'amis d'aujourd'hui qui déversant des mots qui flattent mon ego comme la croupe d'un cheval de labour et qui plongent dans le sillon définitivement impur
Il y a tant de feux-follets femmes étincelantes qui percent ma ténèbre l'espace d'un instant juste un instant t'es pas rendu mon gars il y a tant de choses en toi alors la marée s'en va et les poissons avec elle alors planté dans la vase tu sais qu'elle t'attend
...et qu'à mesure que l'eau descend sous ta peau tu la sens qui récupère son bien tu lui appartient
Alors elle te ramène chez toi titubant et te borde dans ton lit froid et elle gèlera tes rêves pour que tu ne t'y noies pas pas encore et tu sens ton corps flétrir et racornir sous le gel à mesure qu'à l'intérieur gonfle ton cœur et encore une nuit à attendre de savoir si tu tiendras les pressions à se demander pourquoi ne pas laisser béton cette histoire n'est plus la tienne il est mort depuis longtemps le beau jeune homme au talent il ne reste que sa rage qui demain te tiendra debout comme une momie raidie par le froid avec juste la force de pleurer sous cette putain de pluie où naissent les putains de rêves.
MES AMIS D'ENFANCE
(2:33) (Mano Solo) - © 1995
Je me réveille et planent sur mes rêves
les cadavres debout de mes amis d'enfance
et je me réveille dans l'éther acide
de la mort qui ronge ma peau mon moral
on y passera tous les petits lutins de ma mémoire
mes compagnons d'histoire
qui me dira pourquoi étions-nous si méchants
qu'on doive le payer si chèrement
étions-nous vraiment de trop
que cette vie nous efface si tôt
qui a choisi pour nous
de nous mettre tous dans le même trou
tous avant l'heure
et chaque matin je me réveille avec dans la sueur
de ma nuit froide et pénétrante
le cadavre de l'enfant que je fus hier encore
naïf et romantique
à croire encore que la mort est un jeu
à croire encore que je suis le plus fort !
Mais Raoul et Cathy dansent encore le tango
désarticulés dans la tourmente pantins
de glace miroirs de mon destin.
LE LIMON
(4:17) (Mano Solo) - © 1995
Quand la tempête s'arrête
le limon coule au fond
là où jamais ne pénètre
la moindre lumière le moindre rayon
alors il se dépose
une strate pour chaque chose
retapissant sans cesse
de chaque nuit pour chaque oubli
il n'est rien qui ne puisse s'oublier
ni le goût de l'amer ni le vent sucré
il n'est pas de fardeau
que je ne puisse jeter chaque soir
chaque matin renaissent mes deux poings
debout debout sauve-toi de là tu sais même pas
ni où ni avec qui t'as dormi
debout meus ton corps dans le froid de la rue
une porte qui claque ça fait le même bruit
du bout du monde jusqu'à Paris
sur le pavé de la terre battue
du pays des hommes vaincus
et peut-être bien que la télé
de sa lumière stroboscopique
viendra lécher ton corps
étendu dans l'illusion de se
reposer debout sans domicile
fixe juste une idée fixe
c'est où que demain
je me réveille
c'est où que demain
je me mets debout
il te reste des filles
plein ton carnet d'adresse
y'en a bien une pour toi
derrière sa porte
l'œil de bœuf en prothèse
sans bouger de chez elle elle t'attend
lave-toi les dents
lave-toi la queue
lave-toi les yeux
lave ton esprit des souillures de la vie
il y a bien une douche quelque part
où tu pourras quitter tes vêtements
ton armure contre la rue
et peut-être viendra-t-elle enfin
glisser ses doigts sur ta peau d'enfant
et peut-être même
mettre ton sexe debout
et tout ton être avec
debout
JE REVIENS
(3:18) (Mano Solo / Matu) - © 1995
J'ai pas vu passer le temps
le vent les grandes marées
je suis pas vieux pourtant
je suis fatigué
j'ai pas vu passer le plaisir
mais j'en garde les marques qui font souffrir
c'est pas des trucs qu'on emprisonne
c'est juste là ça résonne
j'ai pas vu passer le temps
le vent les grandes marées
ils ont bien dû gueuler
les cormorans mais j'avais le dos tourné
sur toute une vie dont il n'est rien resté
qu'un tatouage obsolète sur ma peau délavée
et je regarde les néons
qui font les cons
là-bas sur le périphe
c'est tout rouge tout bleu
je ferme les yeux
j'ai jamais vu du noir si beau
elle habite au vingtième
ça fait treize étages plus haut que le septième ciel
quand je descendrai d'ici
plus rien ne sera jamais pareil
une nouvelle peau sortie de la plaie
je me sens bien
je reviens
j'ai touché le fond lâché du lest
les morues les cafards et tout le reste
je me sens bien
marcher dans les rues à pleins poumons
l'odeur des femmes de leur giron
je me sens bien
je reviens
ce n'est plus la même terre
mais il y a un ciel aussi
et celui-là il est à moi
j'aurais jamais dû te laisser ma ville
mais je me sens bien
je reviens.
TOUS LES JOURS
(2:47) (Mano Solo) - © 1995
Tous les jours sont pour moi comme quand on descend d'un train
et qu'on aimerait bien qu'il y ait quelqu'un
juste un petit cœur tendre
qui serait là à m'attendre
mais sur le quai y'a pas foule juste deux trois connaissances
le désir la mort la malchance
j'ai fait comme si je les avais pas vus
mais c'est eux qui me collent au cul
fera-t-il jour un jour
dans ma nuit de l'amour
me lèverai-je un matin
avec autre chose que du chagrin
tu me manques je sais même plus combien
j'ai jamais su compter si loin
j'ai dû croiser trop de chats noirs
et il pleuvait des enclumes
toujours dans la côte
et jamais le vent dans le dos
alors je continue je monte sur scène
j'y crache ma peine
et je continue ce n'est que ma vie
excuse-moi de l'odeur
excuse-moi pour tout excuse-moi de la peur
PONT D'AUSTERLITZ
(3:29) (Mano Solo / Napo Romero) - © 1995
Je me suis levé ce matin avec dans la bouche
l'arrière-goût d'un amour louche
pour une fille perdue
un beau jour au coin de la rue
je ne l'ai jamais revue
Pont d'Austerlitz
c'est là qu'est la tombe de notre amour
et j'y vais pas y mettre des fleurs
n'aies pas peur
et devant nous la ville accouche
du spectacle d'un bateau mouche
qui sans égards
dévore toute une portée de canards
et nos yeux restent cloués
on voudrait voir quelque chose remonter
c'en est fini des petites boules jaunes
dans l'œil froncé d'un mauvais cyclone
et d'un coup l'eau dégeulasse
a bouffé tout l'horizon
et dans notre bouche le goût fadasse
d'un silence de plomb
Pont d'Austerlitz
tu t'es barré en criant c'est pas toi que je hais
c'est cette terre entière
qu'on me foute la paix
c'est ma seule prière
Je me suis levé ce matin avec dans la bouche
l'arrière-goût d'un amour louche
pour une fille perdue
un beau jour au coin de la rue
je ne l'ai jamais revue
Pont d'Austerlitz
c'est là qu'est la tombe de notre amour
et j'y vais pas y mettre des fleurs
n'aies pas peur