TE SOUVIENS-TU
(3:08) (Mano Solo) - © 1997


Te souviens-tu de cet enfant
Et de ses yeux qui lui mangeaient le visage
Te souviens-tu des deux dents de devant
Volées dans la nuit par toute une bande de souris
Te souviens-tu de cet enfant
De sa panoplie d'Zoro
De tout c'qu'il trouvait beau
De ses grimaces devant la glace
Qu'on avait peur qu'il reste québlo
Si les cloches sonnent

Refrain
J'me souviens de rien, maman
Plus j'avance et moins j'me r'tourne
Et tu sais pour tout ça j'ai pas l'temps
Tout s'efface et la roue tourne

Te souviens-tu de cet enfant
Si petit et déjà si chiant
Un ange malin
Petit diable hautain
Qui de toutes ses facéties
Ramenait toujours l'attention sur lui
Te souviens-tu de cet enfant
De notre amour si fort
Nos joies, nos réconforts
Nos milliers de pourquoi
Te souviens-tu mon fils
Te souviens-tu de toi

Refrain

Te souviens-tu de cet enfant
Quand son auréole s'allumait d'un sourire
Dans la cour d'école voyant sa mère venir
Quand la tête entre deux mamelles il disait
"Maman t'es la plus belle !"

Refrain (bis)

LES FÉES
(2:30) (Mano Solo) - © 1997


Y en avait des fées autour de mon berceau, y en avait des fées et des salauds.
Et tout ce beau monde s'est battu pour moi, et j'ai tout pris, les bons sorts, le mauvais sang. Ils ont donné tout en même temps à ce petit corps, maladresse et talent.

Les farfadets de la misère m'ont pris pour leur cimetière, venant déposer en moi leurs dernières lumières, leurs derniers combats, on finit là, remplissant mon sourire nerveux, ils m'ont donné leurs dernières cartouches. Ils comptent sur moi, ils comptent sur moi.

Au-dessus de mon berceau volaient les anges si beaux, trop beaux pour être honnêtes. Ils souillèrent mon cœur de leur fange et percèrent ma peau de leurs flèches. 
Je reste là, Saint Sébastien de l'amour, épouvantail à demoiselles, souffrance pourtant si belle qu'elle tourne autour.

LA LIBERTÉ
(4:10) (Mano Solo) - © 1997


La liberté se paie
Par un linceul de regrets
Mais ai-je vraiment eu tort ?
Tous les chemins ne mènent-ils pas à la mort ?
Qui n'échangerait pas cent ans d'ennui
Contre 35 ans de vie ?
J'ai voulu voler
Pas voulu marcher
Voulu réchauffer ma couenne de papier
J'ai joué avec le soleil qui m'a cramé les ailes
Mais je l'ai vu de si près
Que peu de gens peuvent en dire autant

Oui j'ai vécu si fort
Que j'ai tué ce corps
Fondu désintégré en plein élan
Comme une statue éphémère
En suspend dans l'air
Les plus belles femmes du monde
Se sont penchées sur mon cas
Au moins cinq secondes
J'ai été riche à millions
De tous ces p'tits corps si mignons mignons

La liberté ou la mort :
J'aurai eu les deux
La liberté ou la mort
C'est mieux que d'finir vieux

J'ai joué avec le soleil qui m'a crevé les ailes
Mais je l'ai vu de si près
Que peu de gens peuvent en dire autant

La liberté ou la mort :
J'aurai eu les deux
La liberté ou la mort
C'est mieux que d'finir vieux

SENS-TU
(4:01) (Mano Solo) - © 1997


Les anges aux dents cariées n'attendent rien d'un sourire.
Les anges aux poches percées n'ont que leur grappin pour pas mourir. 
Tu verras qu'on s'en sortira sans devenir durs comme du bois.
Nous porterons nos montagnes, on se rencontrera.

N'aies pas peur, viendra le jour et l'heure, en douceur la vie soufflera ses vraies couleurs. 

Sens-tu que l'amour est en moi, que mon cœur te montre du doigt. 
Sens-tu cette liberté nouvelle débarrassée d'un fantôme cruel. 
Vois-tu ta beauté dans mes yeux quand ils s'éclairent de ta lumière. 
Vois-tu la paix que tu leur confères quand mon poing s'ouvre enfin. 
Vois-tu la joie dans les larmes d'un combattant que tu désarmes, fourbu de fourbir chaque soir ses rasoirs pour trancher dans le noir. 
Sais-tu que tes bras seront pour moi tout un monde où réchauffer mes guerres. 
Sais-tu que tes bras seront pour moi tout un monde où peut-être enfin je pourrais me taire.

LE DRAPEAU
(3:36) (Mano Solo) - © 1997


Ça fait des mois que je t'attends, tant et tellement que j'attendais plus, j'étais presque mort. J'ai fait mille fois dans ma tête le Picasso de ton portrait, un oeil ici, une oreille par là-bas, tu paraissais d'un autre monde.
Mais j'étais loin de me douter, cette couleur sur ta peau, la même que quand on ferme les yeux parce que tout va bien. Couleur que portent les hommes comme moi, couleur d'anarchie, de pirates, tu seras le drapeau et moi la tête de mort, et nous claquerons dans la brise au milieu des cris d'oiseaux, dans cette vie qui s'amenuise nous résisterons jusqu'au dernier lambeau.
Tu es si jolie. 
Je ne sais quoi te dire. J'ai dans la bouche une colonie de cafards et si je l'ouvre ils se jetteront sur toi pour manger dans ton regard la moindre lueur d'espoir. Tu es si jolie et moi je suis si noir. Derrière ma peau il fait nuit froide putain pourtant j'ai la fièvre. 
Je me suis vu tout contre toi à noircir ma bouche sur ta peau. Mais toi peut-être ne vois-tu là qu'un petit crapeau blanc qui te fait de l'oeil couvert de pustules venimeuses et qui fume tant qu'il explose. Mais j'ai vu dans le noir comme un chat que tu étais belle à en mourir. Mais j'ai pas vu ton cœur bondir ni ta peau crier vers moi. 
Tu es si jolie.

ÇA N'A PAS MARCHÉ
(2:29) (Mano Solo) - © 1997


Alors ça n'a pas marché, tu ne m'as pas laissé l'ombre d'une chance d'être vivant.
Pour toi je suis déjà mort et tu ne veux t'approcher voir ce cœur décomposé. 
Et c'est mon cadavre qui rentre chez moi ravaler son envie de pleurer tristement. 
Mais il n'y a plus de rivière dans ce corps, sur cette terre je suis déjà mort. 

Je ne pleure ni ne ris alors que mon espoir s'enfuit. J'avais caressé des deux mains l'idée que nous aurions pu nous aimer.
J'ai remis de la paille sur mon feu et du brasier au fond de mes yeux.
Mais tu n'as vu là que vision d'enfer, une camarde en pleine prière. 
Sur cette terre je suis déjà mort, pourtant tu sais je bande encore, je bande encore. 

J'ai plus de force qu'il n'en faut pour te prendre dans mes bras.
J'aurais voulu déposer sur ta peau toute cette tendresse en moi, quand je pose les yeux sur toi.

JANVIER
(2:49) (Mano Solo / Eric Bijon) - © 1997


Janvier à ma fenêtre, je regarde la rue, où sont plantés les êtres un rayon de soleil serait pas superflu. Au balcon de mon deux pièces, je fume en hiver, en crachant de bons vieux glaires comme j'aurai craché le noir de ma nuit. Comme j'aurai craché, la haine ou l'amour comme le fit ma mère en me cranchant moi. 
Janvier à ma fenetre à mes pieds se dégorge le monde, je sais qu'en bas, au coin, quelque chose m'attend ou bien quelqu'un. Et les gens m'aiment parce que je suis triste, alors, pourquoi ils veulent que je change ? Et les gens m'aiment parce que je suis seul, et les gens m'aiment parce que j'ai mal, et les gens m'aiment parce que je meurs à leur place en quelque sorte, drôle d'histoire, j'y comprends rien ... 
Janvier à ma fenêtre, je tire le rideau, rien ne sera plus jamais beau. Les gens qui vivent autour de moi savent bien à quel point je t'aime, ils ne voient pas bouger mes lèvres mais ils savent qu'elles parlent de toi. les gens qui vivent autour de moi ne me demandent plus à quoi je pense, ils savent que je vis un monde de glace, ils savent que leur sourire ne réchauffe que son porteur ils savent que jamais plus tu ne me tendras la main, ils voudraient bien que je t'oublie, que je les aime autant que tu me fais la gueule, les gens qui m'aiment sont bien seuls. 
Et moi j'suis bien tout seul, avec tout ces gens qui m'aiment, tout ces gens qui m'aiment ...

IL M'ARRIVE ENCORE
(2:27) (Mano Solo) - © 1997


Il m'arrive encore
De temps en temps
De sortir voir
S'il y a des enfants
Il m'arrive encore
Des mariages soudains
Frôlés dans les rues
Le temps d'un parfum
Il m'arrive toujours
De leur faire l'amour
De mentir un instant

Refrain
Il m'arrive encore
De pleurer sur mon sort
D'avoir peur de la mort
Mais j'suis vivant !

Il m'arrive encore
De penser  toi
De poser mes yeux morts
Sur le souvenir de ton corps
Il m'arrive encore
De rire de moi
D'oublier tous les torts
Tous les remords

Refrain

Il m'arrive encore
Des matins de soleil
Après des nuits sans sommeil
Repu de lune et de miel
Il m'arrive encore
De les trouver belles
Il m'arrive aussi
D'être cruel avec elles

Refrain

QUE RESTE-T-IL À VIVRE
(2:20) (Mano Solo) - © 1997


Que reste-t-il à vivre qui ne soit pas déjà sali, piétiné par l'histoire... 
N'en avons-nous pas les mains trop pleines de tout ce que l'homme peut croire. 
Que reste-t-il à savoir pour atteindre enfin la béatitude du dégoût. 
Que reste-t-il à vivre. 
Les hommes à boire ont-ils encore quand les chiens seront tous morts. De quelle chape de plomb se tailleront-ils de nouveaux poumons. 
Comment brûlerons-nous demain ces tours de fer et de verre.
De quelle charrue pourra bien renaître la terre.

Qui reste-t-il à suivre qui ne soit pas le dernier maillon de la grande chaîne des pièges à cons. 
N'avons-nous vraiment rien à apprendre de tous ces gens qui se sont fait descendre. 
Allons-nous longtemps laisser les urnes se remplir de peste brune. 

Tout bas, tout s'en va. 
Tout qui nous file entre les doigts.

Tout bas...

JE SUIS VENU VOUS VOIR
(3:54) (Mano Solo) - © 1997


Je suis venu vous voir avant de partir, y avait personne ça vaut mieux comme ça, je savais pas trop quoi vous dire, croyez pas que j'vous abandonne même si, encore une fois, je vous laisse le pire : les larmes qu'on verse sur la mort d'un homme. Adieu mes amis, je m'srai bien battu encore, adieu mes amours, priez pour moi... 
Toi que j'aime, que j'ai aimé, compagnon d'un jour ou d'une année, déja tu sais que dans mon cœur même moisi flottent encore violence et tendresse... Mon existence ne tient pas qu'à ma graisse, je suis esprit avant d'être un corps, je suis mort mais rien n'est fini, il reste ma voix et bien peu d'écrits. 
J'avais surtout une grande gueule pour chanter des chansons d'amour pour Paris, sur la ptite scène du Tourtour... Mes amis, ne pleurez pas, le combat continue sans moi, tant que quelqu'un écoutera ma voix je serai vivant dans votre monde à la con ! 
Avec du sang plein les orbites, et même du plastique sur la bite je vais sûrement être recalé à l'examen du grand sage mais j'en profiterai quand même pour lui dire ce que j'en pense de l'existence, cette engeance, et s'il ne voit pas que je suis un ange alors qu'il change de boulot... Et s'il veut, moi je prend sa place : y aura des filles et de la Ganja, des passion sans limites, nous nous battrons des ailes et nous volerons bourrés, nous mangerons des pommes envenimées et nous cracherons le mal comme un pépin, nous serons sincères comme jamais et nous serons beaux pour ça...

C'EST PLUS PAREIL
(4:42) (Mano Solo / Eric Bijon) - © 1997


J'ai tellement parlé de la mort que j'ai cru la noyer, la submerger de ma vie, l'emmerder tant et tellement qu'elle abandonne l'idée même de m'emmener avec elle.
J'ai tout essayé, j'ai peint, j'ai hurlé, j'ai pénétré le pays entier. 
Je lui ai dit c'est pas possible, je suis trop petit pour mourir. 

J'y ai cru, tout le monde y a cru, et puis un matin c'est plus pareil, au pied de ton lit ça ricane et se secoue le paquet d'os.
Et ça fait une petite musique et ça te regarde de toute sa sale gueule et ça te dit
"Ca va? Faut que t'y passes comme tous les autres. Tu as pu blouser les hommes mais pas ton destin. T'as noyé le poisson mais son odeur dégueulasse ne t'a jamais quitté." 

C'est un long voyage cette pensée sur des années, tous ces sentiments qui vont et viennent en hurlant.
Ils repartent en rampant et reviendront plus forts.
Alors la nuit se réveille, les peurs et les cris, tout ce qu'on ravale et tout ce qu'on planque, tout ce que l'on ne veut pas voir, mais le rêve ne sait mentir et la nuit m'épuise. 

Je suis là, je marche mes trente-quatre ans, je me demande combien de fois une vie peut-elle basculer, de combien de naufrages peut-on se retrouver chié, épuisé sur une plage aux vapeurs mortelles de marée noire. 
Je suis là, salut toubib, je suis sur la route, la mauvaise pente comme toujours. 
Tout ça c'est pas beaucoup, on fera avec. 

J'ai passé ces années sans phare, échouant sur mille récifs. J'aurai bu toute cette mer de la planète des femmes. 
J'ai rallié mon île à d'entiers continents, baragouinant mon idiot idiome esperantiste, la langue du baiser. 

J'ai passé ces années de suie à faire la cheminée, attrapant au passage dans la fumée l'histoire de ce feu en moi, dévorant comme le renard du petit spartiate. 
J'ai passé ces années de vent, un voile dans le sourire, à tempêter dans le courant ascendant, plus haut que mon cul, dispensant mon odeur aux alizés.

NOVEMBRE
(2:11) (Mano Solo) - © 1997


Je me dois d'un poème, en cette journée de Novembre à la con. 
Je me dois d'une lutte fut elle minuscule, je me dois d'un crachat, ja me dois d'un éclat. 
Je me dois d'un souffle sur ce monde entier qui se refuse à moi, je me dois ta conquête. 
Ça m'aurait plu d'écrire une chanson d'amour qui ne soit pas qu'une douleur. 
Ça m'aurait plu de pendre à ton cou un petit sourir de vainqueur. 
Peut-être que mon discours aurait changé d'odeur et les gens se seraient dit  : 
"Tiens, pour une fois qu'il ne chiale pas sa mère celui là !" 
Je me dois d'un poème, en cette journée de Novembre à la con.